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L'ancien directeur du quotidien Alger républicain, auteur de la Question, a connu l'Algérie avant, pendant, et après la guerre. Il parle de l'état d'esprit des Algériens qu'il vient de rencontrer.

Vous rentrez d'Alger où vous vous êtes rendu pour le tournage d'un film. Comment les Algériens, les Algérois vivent-ils ce moment particulier qu'est le 40e anniversaire [url=http://www.1855sacramento.com/peuterey.php]peuterey outlet[/url] de la fin de la guerre, et plus particulièrement le débat qu'il y a en France sur la [url=http://www.mansmanifesto.com]doudoune moncler[/url] torture et le sens de cette guerre ?
Henri Alleg. Je suis frappé par l'extrême attention des Algériens au débat sur ces questions. Lors du tournage, sur des lieux où je m'étais trouvé à l'époque, j'ai rencontré des gens comme les mineurs d'Ouenza que nous, militants, avec les syndicats, avions soutenu lors de grèves. Ils se battaient pour avoir un peu d'eau, quand les cadres européens avaient la douche tous les jours à domicile. Ils ne l'ont pas oublié.
· Alger, je suis revenu dans les immeubles où se pratiquait la torture à l'époque de Massu et d'Aussaresses. Un de ces immeubles se situe boulevard Clemenceau, là où Ali Boumendjel a été jeté du sixième étage sur ordre d'Aussaresses, et où Audin et moi-même avons été séquestrés. Dans cette maison, devenue normale, avec des enfants qui jouent dans la cour, des gens qui ouvrent la porte pour voir filmer, j'ai rencontré des personnes beaucoup plus jeunes. L'un deux, chauffeur de taxi, était au courant - " oui, c'est de notre terrasse là-haut qu'il a été " suicidé ", oui je sais qu'il y a eu ici des gens torturés, nous savons tout cela ". Quand nous sommes redescendus vers le troisième étage, une femme a ouvert la porte et m'a embrassé en disant : " Nous vous [url=http://www.1855sacramento.com/peuterey.php]giubbotti peuterey[/url] connaissons, nous vous avons vu à la télé, nous savons qui vous êtes. " Trois de ses filles étaient dans le couloir et souriaient en me disant : " C'est bien que vous soyez venu, ce [url=http://www.materialistanyces.com]louboutin[/url] sont des choses qu'il ne faut pas oublier, et nous savons qu'il y a eu des Européens, des Fran?ais qui se sont battus pour la liberté de l'Algérie. " Partout, des gens me reconnaissaient, avec des gestes de sympathie extrêmement intenses et forts.

Cela s'adressait-il aussi à l'auteur de la Question ?
Henri Alleg. Je ne pense pas. Mon nom est connu puisque j'ai été directeur du journal Alger républicain jusqu'à ce qu'il soit interdit, mais les Algériens sont surtout sensibles à cette grande campagne de vérité ouverte en France. Les foyers algériens, même les plus humbles, les plus pauvres, ont une antenne parabolique et suivent les [url=http://www.rtnagel.com/louboutin.php]louboutin[/url] émissions fran?aises sur la guerre d'Algérie. Ils parlent beaucoup de ce qu'a fait l'Humanité, des Douze. Au retour, dans l'avion, deux personnes sont venues me dire : " Il faut continuer, c'est très important. " Ce sont des gens qui font la navette entre la France et l'Algérie, qui ont des parents des deux c?tés, et qui aspirent profondément à une relation débarrassée de toutes les séquelles de la guerre et de la colonisation. Je me dis souvent : quel gaspillage a été cet acharnement mis à perpétuer la domination coloniale. Tout cela est pris peut-être encore plus profondément, plus solennellement, qu'en France même où le débat peut appara?tre parfois comme relevant de la polémique politique. Pour les Algériens, cette mise à jour a encore plus d'importance pour le présent et pour l'avenir. Ils ont l'impression que l'on peut ainsi tourner la page de la guerre.

Est-ce que cette exigence de vérité porte aussi sur l'Algérie elle-même, sur le pouvoir en place qui, de son c?té, n'a jamais beaucoup tenu à revenir sur un certain nombre de choses, et pas seulement sur les exactions qu'on reproche au FLN du temps de la guerre ou de l'après-guerre, mais aussi sur l'absence de démocratie ?
Henri Alleg. Je le crois. Vous avez mis le doigt sur quelque chose de très important. Aujourd'hui, les Algériens, surtout ceux de la trentaine, ne veulent plus d'une vérité officielle, assénée d'en haut. Ils veulent conna?tre tous les aspects de ce combat, y compris les faiblesses et plus que les faiblesses qui ont marqué à la fois, pendant et après la guerre, le comportement algérien. Ils n'acceptent plus qu'on leur raconte une histoire selon laquelle [url=http://www.1855sacramento.com/woolrich.php]woolrich parka[/url] tout était absolument noir d'un c?té, même s'il était sombre pour l'essentiel, et tout blanc de l'autre c?té. Ils veulent qu'on leur dise la vérité, sans édulcorer les manquements du c?té algérien sur le plan des droits, de la dignité de l'homme. Ils le veulent, même s'ils savent ou s'ils se doutent que c'était la guerre, que les atrocités commises par l'armée coloniale étaient tellement évidentes, tellement lourdes, qu'elles ne pouvaient qu'encourager des réactions aussi cruelles du c?té algérien. Et cela, sans oublier, tout de même, que ces actes inadmissibles étaient beaucoup moins institutionnalisés, puisqu'ils n'étaient pas le fait d'une armée régulière et d'un ?tat organisé comme c'était le cas pour la France. Quoi qu'il en soit, les Algériens veulent en savoir davantage. C'est un mouvement que je pense irréversible.

Avez-vous le sentiment que les cadres dirigeants de l'Algérie sont prêts ou non à entreprendre ce travail de vérité, d'explication ?
Henri Alleg. Je n'ai pas eu de contacts avec des officiels à Alger. J'ai rencontré des universitaires, des officiers supérieurs à la retraite. Je ne me suis pas permis de dire à ces Algériens ce qu'il faut faire ou ne pas faire, ils [url=http://www.par5club.com/louboutin.php]louboutin[/url] sont assez grands pour en décider eux-mêmes, mais je leur donnais mon opinion et j'ai eu le sentiment de trouver auprès d'eux une écoute tout à fait favorable. Pour eux, il faut parler de [url=http://www.eastscotinvest.co.uk/mulberry.html]mulberry sale[/url] ce qui n'a pas marché, de ce qui a été oblitéré pendant tant d'années, mais en exigeant avant tout que la France assume ses responsabilités. Ils regrettent, à cet égard, que les autorités fran?aises, chef de l'?tat ou chef du gouvernement, n'aillent pas encore jusqu'au bout de cette reconnaissance.

Ce [url=http://www.rtnagel.com/airjordan.php]nike air jordan pas cher[/url] processus peut-il avoir des conséquences bénéfiques sur les rapports entre jeunes des deux pays, en particulier sur les enfants de l'immigration en France ?
Henri Alleg. J'en suis persuadé. La vérité, la connaissance de sa véritable histoire, des sources des conflits, facilitent la compréhension et font reculer les préjugés. Il y a dans la jeunesse un fort courant [url=http://www.mansmanifesto.com]doudoune moncler homme[/url] antiraciste, et ce que j'ai ressenti en Algérie peut y aider grandement.

S'agissant du 19 mars, donc du retour sur la guerre, il est de plus en plus admis par les observateurs sérieux, qu'avant même l'insurrection du 1er novembre 1954, toutes les portes ont été refermées chaque fois que la moindre réforme a été envisagée, notamment sur le statut des Algériens. Ce blocage explique-t-il aussi le caractère extrêmement violent du [url=http://www.achbanker.com/home.php]www.achbanker.com/home.php[/url] conflit ?
Henri Alleg. Absolument. Un dirigeant du FLN l'a exprimé par une image : " L'insurrection, c'est la France qui l'a déclenchée. [url=http://www.sandvikfw.net/shopuk.php]hollister sale[/url] " Il disait à son interlocuteur fran?ais : nous avons protesté parce que nous n'avions pas la parole, et quand il y a eu des élections, en 1951, qui devaient créer deux collèges à égalité et qui, cependant, faisaient qu'un seul million d'Européens avait autant d'élus que des millions d'Algériens, vous avez encore trouvé le moyen de les truquer. La seule porte où passer, il fallait bien l'enfoncer, et cela a été la lutte armée. Sans compter que, dans ce système colonial, neuf enfants algériens sur dix n'étaient pas scolarisés.

Cet encha?nement, ces portes fermées, cette forme très violente de la lutte, ont-ils hypothéqué ce qui aurait pu être un pluralisme politique dans le mouvement d'émancipation nationale ?
Henri Alleg. Je ne crois pas. Le problème ne s'est pas posé ainsi. On ne parlait pas d'ailleurs de pluralisme. Bien s?r, chacun avait ses positions, en particulier le Parti communiste algérien qui se battait pour l'indépendance et aussi pour une société fraternelle, socialiste, quelles que soient les composantes ethniques. Mais à cette époque-là, toutes les parties se sont unies, partageant l'idée qu'il fallait être tous ensemble contre le colonialisme. Les différences, réelles, étaient éclipsées pour un temps par cette grande ambition de souder tout le peuple algérien. Mais je tiens à redire que, si l'Algérie a été une colonie de peuplement, tous les Européens n'étaient pas forcément des colonialistes et des racistes. Il y avait des gens courageux, les villes d'Oran, de Sidi Bel Abbès étaient dirigées par des maires communistes, en union avec des nationalistes. Malheureusement, les représentants européens d'une autre orientation que le statu quo ont été arrêtés, expulsés, jetés dans des prisons, leur journal interdit. Cette originalité algérienne a connu un sort tragique, il suffit de citer, parmi d'autres, les noms qui me sont familiers de Maurice Audin, Henri Maillot, Maurice Laborde, Fernand Yveton. Ils étaient le symbole de la volonté de ces Algériens d'origine européenne de favoriser la naissance d'une Algérie nouvelle, et ces Algériens d'aujourd'hui qui m'embrassent, c'est à ces hommes-là aussi qu'ils pensent.

Ce travail de vérité du c?té fran?ais, avec les résonances du c?té algérien, peut-il aider à surmonter les ressentiments qui s'expriment encore chez des anciens soldats meurtris, des pieds-noirs nostalgiques, des familles de harkis douloureuses, pas forcément pour donner raison à tout le monde, mais pour faire reculer les blocages d'un certain nombre de gens ?
Henri Alleg. Je crois effectivement que ce 40e anniversaire pourrait marquer le début d'un dialogue, d'une véritable ouverture de discussions entre les gens honnêtes, de bonne volonté, et qui veulent en finir avec les préjugés racistes et colonialistes.
Propos recueillis
par Charles Silvestre

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